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Ma vie a repris (presque) comme avant la prostatectomie
Ma vie a repris (presque) comme avant la prostatectomie
Bonjour,
C’est important pour moi de commencer mon premier post sur ce forum par des remerciements aux professionnels de santé que j’ai croisés. Sans eux je ne serai pas soigné ni confiant pour l’avenir : MERCI à eux.
J’ai 49 ans, un peu sportif. Le diagnostic de cancer de la prostate est tombé cet hiver : pas facile à encaisser. Dans les lignes qui suivent j’ai essayé de décrire simplement mon parcours et ce que j’ai ressenti.
J’ai eu la chance d’être diagnostiqué à temps. A ce propos, je ne comprends pas pourquoi le dosage des PSA entre 45 et 50 ans n’est pas plus recommandé, à défaut d’être systématisé. Je vois peu de communication sur cet outil de dépistage alors qu’il y a beaucoup de communication sur le dépistage des cancers du sein, du colon ou de l’utérus. Je referme cette parenthèse.
Bref, premier dosage PSA en novembre 2023 un peu au-dessus de 5. Grâce à mon médecin généraliste réactif et très pro, j’obtiens un rdv rapide avec un urologue très sympa avec qui les échanges sont simples, précis et avec qui je me sens en confiance. IRM de confirmation début janvier, puis biopsie, puis bilan d’extension (négatif) puis prostatectomie totale assistée par robot le 4 mars. Je ne suis pas allé voir un deuxième avis pour plusieurs raisons : bons échanges avec l’urologue, très expérimenté avec le robot Vinci, service d’urologie réputé et accord sur la décision de PR.
Au moment du diagnostic, j’ai passé les pires fêtes de fin d’année de ma vie. J’étais au fond du trou. Le parcours médical m’a grandement aidé : tous les professionnels de santé que j’ai croisés sont des gens formidables. Les secrétaires qui se débrouillent et insistent pour te trouver le RDV parfait, le brancardier qui a le bon mot, les infirmières du service d’urologie toujours dispos et souriantes, les infirmières à domicile qui ont joué un rôle déterminant dans ma convalescence (toujours le mot juste, la distance parfaite), et le chirurgien urologue qui m’a beaucoup écouté, conseillé, et qui m’a opéré et m’a donc offert « une deuxième vie » sans cancer.
Le choix de la PR s’imposait vu mon âge et ma sensibilité au monde médical (papa médecin de campagne, moi chercheur en chimie/pharma/biomédical). J’ai eu la chance d’être diagnostiqué tôt et avec un peu de recul j’ai l’impression d’avoir rapidement récupéré. Je revis aujourd’hui (presque) comme avant.
Avant la chirurgie, j’ai augmenté un peu la dose de sport pour arriver en pleine forme le jour de l’opération (et puis le sport, ça vide la tête).
Opéré le 4 mars et sorti de la clinique le lendemain (trop tôt à mon gout), je suis rentré chez moi bien sonné et avec pas mal de douleurs. Ma récupération (convalescence) s’est déroulée par paliers de progression.
La première semaine j’étais vraiment dans le dur. J’aurais préféré passer une nuit de plus à la clinique (ma femme n’est pas infirmière, et me voir dans le dur n’était pas cool pour elle). Arrêt des opioïdes au bout de 4 jours. On ne m’avait pas prévenu que le transit intestinal pouvait être quasi-bloqué en post-opératoire : si j’avais su j’aurais anticipé et mangé plus de fibres la semaine précédent l’opération.
La deuxième semaine, à J7, le retrait de la sonde a été un vrai soulagement. Je n’en pouvais plus de ce tuyau dans mon corps, pas vraiment douloureux mais très inconfortable. L’ablation de la sonde se fait sans aucune douleur (j’avais très peur de cette étape). Après l’ablation des agrafes, de nouvelles douleurs apparaissent mais elles diminuent au cours de la semaine. Je me rassurais en me disant que c’était sans doute lié à la cicatrisation.
L’établissement dans lequel j’ai été opéré proposait une journée « d’hyper-préparation » (sic) 15 jours avant l’intervention, au sein du service d’urologie. Malgré cette journée, je n’étais pas préparé à toutes ces douleurs. Uriner générait des douleurs dans la zone scrotum + périnée + péri-anal, et aller à la selle sans suppositoire et sans régime adapté était impossible (et la constipation augmente la pression, donc les douleurs, sur la zone opérée).Je demandais parfois « mais pourquoi j’ai mal ? c’est normal ou c’est pas normal ?… ». A cette période j’ai eu un échange téléphonique avec le chirurgien, j’ai aussi eu la visite de mon généraliste, et les échanges quotidiens avec les infirmières ont été très bénéfiques. Etre rassuré par le corps médical au sujet de ces douleurs m’a aidé. Ca enlève du stress.
La troisième semaine, les douleurs étaient toujours présentes (en baisse) et les problèmes/douleurs de mictions et d’exonération toujours présents eux aussi. J’ai commencé à beaucoup gagner en mobilité et c’est la période où le moral remonte vraiment. Comme je n’avais presque pas eu de problème de continence en post-opératoire, j’avais un peu oublié de faire mes exercices de rééducation du périnée en semaine 2. Avec le recul c’était une erreur, car dès que j’ai repris ces exercices au cours de la troisième semaine, les douleurs ont beaucoup diminué. Cela m’a permis de reprendre ponctuellement mon activité professionnelle pour régler quelques urgences administratives et organiser une courte réunion. En fin de semaine 3 j’avais passé un palier et je me sentais bien mieux.
La quatrième semaine les douleurs ont vraiment diminué. J’ai augmenté la durée des marches (mais je maintenais une bonne sieste quotidienne) et j’ai repris le boulot en pointillé.
La cinquième semaine, le chirurgien m’a appelé pour m’informer que le bilan d’anapath était très bon et que je pouvais reprendre la natation. J’ai donc repris progressivement le sport (au début ça tire un peu, il faut y aller progressivement, se concentrer sur ses sensations). J’ai aussi repris une vie sociale et les bons moments se sont enchainés.
La septième semaine je me suis fait un programme de reprise sportif progressif: natation, course à pied en douceur, un peu de gainage statique (j’ai beaucoup perdu de muscles abdominaux) pour pouvoir reprendre le windsurf en fin de semaine 7.
Aujourd’hui j’attaque la neuvième semaine post-opératoire. Je me sens guéri. J’ai pris un peu de ventre et + 2 kg (ah les abdos). J’ai repris en douceur toutes mes activités sportives (sauf le vélo), sociales et professionnelles. La vie sexuelle est un peu différente. La reconstruction nerveuse prend du temps et les problèmes d’érection ne sont pas réglés (le tadalafil a peu d’effet). Mon chirurgien m’a dit de ne pas m’inquiéter et de patienter, ça va revenir. Je lui fais confiance.
Je dis souvent que j’ai la chance de commencer une deuxième vie grâce à ce diagnostic réalisé à temps, grâce aux soignants qui ont pris soin de mon corps, et avec le soutien de ma femme, de mes filles et de mes amis. Parfois on me répond que si j’avais eu de la chance je n’aurais pas eu de cancer de la prostate à moins de 50 ans. C’est vrai aussi, mais je ne me peux m’empêcher de penser à tous les hommes, parfois plus jeunes que moi, qui ont eu un diagnostic plus sombre que le mien, et je me mesure ma chance de vivre aujourd’hui sans cancer.
Il me reste encore du chemin à parcourir pour récupérer ma condition physique d’avant l’opération, et il me reste encore un peu de « ménage » à faire dans ma tête, parce que la période qui a suivi l’annonce du diagnostic a été difficile à vivre. Il y a eu un vrai télescopage entre l’ambiance « fêtes de Noël » et le choc, la sidération, causée par le mot « cancer ». Il fallait continuer à vivre « normalement », donner le change (au boulot, à la maison), rassurer la cellule familiale, faire avancer nos projets de vie de famille. Et dans le même temps mon cerveau broyait du noir parce que j’avais l’impression de me préparer à faire le deuil de ma vie.
Avec le recul j’aurais dû consulter un psy à ce moment. Mais tout s’est enchainé très vite (et tant mieux). Aujourd’hui je fais ce « ménage » en parlant avec mes proches, et en m’accordant plus temps « pour moi » qu’auparavant, pour le sport, les loisirs, la famille, la musique…