Les cancers de la prostate à faible risque évolutif

Les cancers de la prostate peuvent être classés en plusieurs catégories. Dans le grand groupe des cancers prostatiques dits « localisés » (8 nouveaux cas diagnostiqués sur 10), on retrouve des patients à faibles risques et même à très faibles risques d’évolution du cancer. La surveillance active et les traitements focaux (ciblés) sont réservés à ces groupes de patients afin de préserver leur qualité de vie et de limiter les effets secondaires potentiels des traitements.

 

Définition des cancers de prostate à faible et très faible risque

Catégorie à faible risque

Les patients classés à faibles risques d’évolution de la maladie représentent la moitié des cancers localisés au sein de la prostate. Le faible risque signifie que la tumeur est petite, qu’elle se développe lentement et qu’elle a peu de chance de se propager. Selon la classification de D’AMICO 1, il s’agit de tumeurs dont le PSA est inférieur à 10 avec un score de Gleason inférieur à 7 et une tumeur non palpable au toucher rectal ou qui touche moins d’un lobe.

 

Catégorie à très faible risque

Parmi cette catégorie, il existe encore un petit sous-groupe de cancers dits à « très faible risque », supposés « indolents ». Leur croissance est lente et peu agressive. Il peut s’agir de cancers dormants c’est-à-dire qu’ils peuvent rester stables pendant de nombreuses années voire toute une vie. Ces cancers de prostate indolents sont candidats à la surveillance active. Ces cancers de prostate font moins de 10 mm de diamètre (0,5 cm3). Si on n’a pas mesuré le volume par une imagerie performante, cela se traduit par moins de 3 biopsies positives avec des longueurs inférieures à 3 mm et moins de 15 % de tissu tumoral sur les biopsies.

 

Changement important dans les recommandations des sociétés savantes depuis 2023

A noter : il est proposé automatiquement une surveillance active aux patients ayant un cancer de la prostate de faible risque évolutif selon la classification de D’Amico 1 . En outre, les dernières recommandations de l’AFU (Association Française d’Urologie) indiquent l’information suivante pour les critères d’inclusion à la surveillance active : « la majorité des groupes de consensus s’accordent » au maximum sur les profils suivants « un faible pourcentage de grade 4 » de Gleason « (< 10 %), un nombre de biopsies positives avec un ISUP 2 limité (le plus souvent 2 carottes maximum) et un PSA < 10 ng/mL. Les données de l’IRM orientent également la décision thérapeutique sans pouvoir définir actuellement des critères de sélection et de suivi stricts ».

 

Illustration du classement des cancers de prostate localises

 

 

Tumeur de la prostate de faible risque : erreur dans 20 % des cas

En suivant cette classification, on sous-estime ou on sur-estime le cancer de prostate dans 20 % des cas : en raison du PSA qui peut être corrigé pour chaque individu, du toucher rectal imparfait et du score de Gleason qui peut être erroné.

Correction du PSA

Le PSA varie avec le volume de la prostate et les troubles urinaires. D’autre part, si un patient est obèse, s’il prend des statines ou s’il a un traitement pour l’hypertrophie bénigne (adénome), il faut corriger la valeur du PSA. Il faut également savoir que chaque personne sécrète du PSA de manière différente. Ainsi, cette variabilité individuelle peut faire changer un patient de classe à risque et passer à un traitement agressif ou au contraire, être sous-estimé.

 

Fiabilité du toucher rectal

Le toucher rectal n’est pas toujours fiable pour détecter un cancer de la prostate. Selon les experts, il peut être faux dans plus d’un tiers des cas. Cela dépend de la taille de la tumeur et de sa position dans la prostate. Même si une tumeur est présente, il n’est pas certain qu’elle puisse être sentie lors de cet examen.

En cas de dépistage précoce sans symptômes, l’efficacité ne serait pas réduite sans toucher rectal avec un PSA seul : Matsukawa A, Yanagisawa T, Bekku K, Kardoust Parizi M, Laukhtina E, Klemm J, Chiujdea S, Mori K, Kimura S, Fazekas T, Miszczyk M, Miki J, Kimura T, Karakiewicz PI, Rajwa P, Shariat SF. Comparing the Performance of Digital Rectal Examination and Prostate-specific Antigen as a Screening Test for Prostate Cancer: A Systematic Review and Meta-analysis. Eur Urol Oncol. 2024 Jan 4:S2588-9311(23)00292-4. doi: 10.1016/j.euo.2023.12.005. Epub ahead of print. PMID: 38182488.

Score de Gleason sous-estimé

C’est un peu la même chose pour le score de Gleason. Il est sous estimé dans 20 % des cas lorsque l’on compare les résultats des prélèvements de biopsie avec l’analyse de la prostate entière après une chirurgie de la prostate. En outre, si on fait relire les lames des biopsies par des anatomopathologistes en double-aveugle, ils ne sont pas d’accord entre eux sur le score de Gleason dans 5 à 10 % des cas.

D’où cette incertitude des cancers de prostate à faible risque dans 20 % des cas. Malgré les avancées scientifiques considérables, la médecine n’est pas une science exacte bien qu’elle ne cesse d’évoluer.

 

Cancer prostatique de faible risque : affiner le classement

Les analyses génétiques se développent de plus en plus et sont maintenant accessibles aux patients. Avec ces nouveaux tests, tel que le marqueur moléculaire Prolaris, on peut reclasser les cancers de la prostate, en particulier les faibles risques.

D’autres tests, comme le séquençage génétique pour identifier les mutations, sont actuellement en développement et permettent eux aussi d’affiner l’analyse du cancer afin d’optimiser et de personnaliser les traitements grâce à un typage moléculaire à l’exemple du cancer du sein.

Ces marqueurs moléculaires arrivent donc en complément des techniques d’imagerie et complètent l’arsenal à disposition.

 

Surveillance active ou traitement : comment choisir ?

Face à la diversité des cancers de prostate, il est crucial de déterminer si votre tumeur est classée dans le groupe à faible ou très faible risque afin de définir la stratégie thérapeutique la plus adaptée. Grâce aux avancées de la médecine personnalisée, il est désormais possible d’adapter le traitement à chaque patient, en privilégiant des approches moins invasives comme la surveillance active et les traitements focaux lorsque cela est possible afin de préserver votre qualité de vie. Ces stratégies peuvent parfois suffire, à défaut, elles permettent de gagner du temps pour préserver votre qualité de vie avant un traitement plus radical. Il est essentiel de discuter avec votre urologue pour élaborer un plan de soins sur mesure et bénéficier d’un suivi régulier.

 

 

Résultats de l'étude PROTECT

Il s'agit de l'une des 5 études à plus haut niveau de preuves au niveau mondial dans le domaine de l'urologie oncologique. Elle compare la mortalité entre les choix de surveillance active, de radiothérapie ou de chirurgie pour les cancers localisés de la prostate avec un suivi de 15 ans. L'ANAMACaP a eu la chance d'interviewer le Pr HAMDY, investigateur principal de l'étude, par le biais du Président de son conseil scientifique, le Pr CUSSSENOT, avec lequel il travaille à Oxford en Angletterre.

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Mise à jour octobre 2024

 

Sources :